Mélanie Potez : Coklikoz@aol.COM
Emilie Carreno : emiliecarreno@aol.Com
Vannevar Bush et le Memex
1. Vannevar Bush (1890-1974)
Né en 1890 dans le Massachuset, Vannevar Bush fut d’abord professeur
en génie électrique au Massachuset Institute of Technology MIT.
Ses articles et ses inventions le firent remarquer par le Président
Roosevelt, dont il devint en 1940 un des conseillers scientifiques. En 1941,
il fut nommé directeur de l’Office du Développement et de la
Recherche Scientifique, un organisme fédéral qui coordonnait
les activités d’environ 6 000 chercheurs américains. L’ensemble
de ces activités, couvrant l’éventail des disciplines scientifiques,
était destiné à l’effort de guerre. A ce titre,
V.
Bush eut une vue imprenable sur l’étendue des connaissances et l’abondance
des découvertes qui avaient lieu à cette époque.
M. Bush forgea l'idée selon laquelle le domaine de la science allait
être une « frontière infinie » pour le pays, et les
investissements qui seraient consentis rapporteraient gros pour la sécurité
nationale et l'avancement social. De fait, l'effort de guerre fit voir le
jour à toute une génération de scientifiques de haut
niveau déterminés à travailler pour la sécurité
nationale, des hommes (et quelques femmes) qui offrirent leurs services à
tour de rôle à l'administration, aux laboratoires nationaux et
au MIT.
En 1950, le Congrès instaura la Fondation nationale des sciences
en confiant à Dr Vannevar Bush pour mission de
promouvoir la recherche
et le développement ainsi que la formation de scientifiques. Nourrie
par les craintes qu'inspirait la guerre froide, la recherche universitaire
parrainée par l'État fédéral ne tarda pas à
faire figure de grosse entreprise, les dépenses fédérales
engagées à ce titre ayant dépassé le milliard
de dollars en 1950. Dans les années qui suivirent, les subventions
publiques et privées aux contrats de recherche en milieu universitaire,
continuèrent de progresser au point d'atteindre vingt et un milliards
de dollars en 1996 .Cette promotion pour la recherche et le développement
va engendrer une
croissance assez conséquente
des écrits
à caractère technique qui exigent de la part des scientifiques
la capacité de gérer des masses énormes de documents.
L'ordinateur n'était pas encore inventé mais on se pose le problème
de la "mécanisation de la pensée".
Comme les grandes encyclopédies peinent à suivre le rythme
de mise à jour des données scientifiques, ce sont surtout dans
les publications périodiques que paraît la fine pointe de la
recherche. Il est donc de plus en plus difficile pour un individu de se tenir
à jour dans les domaines de pointe.
Divers moyens sont alors imaginés et mis en place, comme de faire
précéder le texte de l’article par une liste de mots clés
ou un résumé. Mais cela ne suffit pas.
Et Vannevar Bush, confronté à ces énormes problèmes
documentaires, proposa en 1945, un article intitulé
As We May
Think ("Comme nous pourrions penser"), dans lequel il s’interroge
sur
l’avenir de l’activité et de la coopération scientifique
en temps de paix.
Dans cet article, Vannevar Bush part du constat que les
travaux et les connaissances scientifiques se multiplient, appelant toujours
plus de spécialisation, mais rendant tout aussi nécessaire l’existence
de ponts entre les disciplines et entre les chercheurs. Or, en regard de
l’abondance des recherches et des articles à connaître, les
moyens utilisés pour accéder à cette production datent
du Moyen Age. V. Bush procède donc à un inventaire exhaustif
des nouveaux supports permettant de conserver, transmettre et consulter des
enregistrements d’information : la photographie, la cellule photoélectrique
et le microfilm, le facsimilé, le sténotype, le tube cathodique,
les supports magnétiques. Il présente également les progrès
réalisés en termes de miniaturisation électrique, et
la puissance de calcul qui en résulte.
Mais pour Vannevar Bush, ces développements technologiques
ne peuvent apporter qu’une partie de la solution.
« Notre inaptitude
à accéder à un enregistrement est en grande partie due
au caractère artificiel de notre système d’indexation. Quand
des données quelconques sont enregistrées, elles sont classées
alphabétiquement ou numériquement, et on retrouve l’information
(lorsqu’on la retrouve) en suivant sa piste de sous-classifications en sous-classifications.
[...] L’esprit humain ne fonctionne pas ainsi. Il agit par association. D’un
sujet, il saute instantanément à un autre, que lui suggère
une association d’idées résultant d’un réseau complexe
de pistes tracées par les cellules du cerveau. »
2. Le Memex
S’inspirant de ce fonctionnement, Vannevar Bush imagine une machine qu’il
nomme le « Memex » (pour Memory extender), sur laquelle on enregistrerait
livres, articles et communications, et suffisamment mécanisée
pour permettre d’y accéder de façon souple et rapide. Le Memex
est composé d’un bureau contenant une grande quantité de microfilms,
d’une plaque transparente sur laquelle sont placés textes, images ou
annotations manuscrites à photographier, d’un clavier de pilotage et
de plusieurs écrans de visualisation.
A partir de cette idée, Vannevar Bush prévoit le développement
de nouvelles formes d’encyclopédie sur microfilms, intégrant
une myriade de pistes de lecture associative ; il évoque l’intérêt
qu’un avocat, un physicien ou un historien pourrait y trouver, et imagine
l’apparition d’une nouvelle profession : traceur de pistes.
Tout en envisageant l'emploi d'un numériseur (scanner pour enregistrer
de nouveaux documents sur microfilms, V. Bush pensait aussi que "
la plupart
des documents constituant le Memex sont achetés à partir de
microfilms prêts à y être insérés. Des livres,
photographies, articles de périodiques, journaux, sont ainsi obtenus
et insérés dans le système. La correspondance d'affaires
y est aussi ajoutée."Vannevar bush The Atlantic Monthly
3. L’après Memex
Quoique "memex" ne fut jamais réalisé,
il inspira à Ted Nelson, vers 1960, le développement de la version
moderne de l'hypertexte qu' il définissait comme étant une
écriture non séquentielle.Douglas Engelbart, pionnier des moyens
modernes de dialogue homme-machine (et inventeur de la souris) reprit dès
1963 les travaux de Bush au sein de Stanford Research Institute. Ceci aboutit
en 1968 à un système appelé NLS (pour oN Line System),
première mise en œuvre effective d'un hypertexte rudimentaire.
De nos jours, l'Américain Gordon Bell, à 68 ans, a entrepris
de se débarrasser de ce qui encombre ses tiroirs et sa vie : lettres,
factures, photos, disques, vidéos, etc. Ce n'est pas pour le simple
plaisir de faire place nette. Ces reliefs de son existence, Bell les transfère
sur un disque dur (après numérisation si nécessaire)
afin de bâtir une mémoire multimédia de sa vie, infaillible
et facile à fouiller avec un moteur de recherche.
Baptisé MyLifeBits (les bouts de ma vie), le projet est mené
par cinq chercheurs au sein d'une petite structure, le Media Presence Research
Group, basée au coeur de San Francisco. Mais le plus spectaculaire
est peut-être que ce travail est entièrement financé par
Microsoft.
L’objectif de Gordon Bell , c'est de donner vie à une utopie
imaginée en 1945 par un autre visionnaire des technologies, Vannevar
Bush. Dans un article célèbre (As we may think, extraits en
français sur mediateur) publié dans The Atlantic Monthly, cet
ancien conseiller de la Maison Blanche avait dessiné les contours d'un
système baptisé Memex, «appareil dans lequel une personne
stocke tous ses livres, ses archives et sa correspondance, et qui est mécanisé
de façon à permettre leur consultation à une vitesse
énorme. Il s'agit d'un supplément agrandi et intime de sa propre
mémoire». Bell pense que le Memex est désormais à
notre portée. «Dans cinq ans, des disques durs d'une capacité
d'un téra-octet (mille milliards d'octets) seront disponibles pour
moins de 300 euros.» De quoi stocker des dizaines de milliers de documents
divers, en évitant toutefois d'abuser de la vidéo (de loin
la plus forte consommatrice de mémoire).
Microsoft à l'assaut de nos archives Libération
17/12/2002
Sources
http://panoramix.univ-paris1.fr/UFR09/memvive/numeros/num4/txt4.html
HYPERTEXTES ET HYPERMEDIAS (dossier paru dans Mémoire Vive)
André ZYSBERG
http://www.ac-creteil.fr/util/programmation/html/html/docs/hyper1.htm
Les premiers visionnaires du Web
http://www.ebsi.umontreal.ca/cursus/vol1no1/teasdale.html#c51
L'hypertexte: historique et applications en bibliothéconomie (octobre
1995)
Guy Teasdale
http://usinfo.state.gov/journals/itsv/1297/ijsf/fmarches.htm
L'essor de l'enseignement supérieur aux Etats-Unis après la
deuxième guerre mondiale
Revue électronique de l'USIA, volume 2, numéro 4, décembre
1997
Théodore Marchese
http://archivesic.ccsd.cnrs.fr/documents/archives0/00/00/03/01/sic_00000301_00/sic_00000301.htm
La bibliothèque virtuelle ou de l'Ars memoria à Xanadu
Bibliothèque nationale de France Mission Politique scientifique de
numérisation Janvier 1995
Yannick Maignien
http://www.bnquebec.ca/fr/biblio/vandendo.pdf
De la lecture sur papyrus à la lecture sur codex électronique
Christian Vandendorpe, Université d’Ottawa
http://www.uottawa.ca/academic/arts/astrolabe/articles/art0003.htm
L'Hypertexte (Université de Montréal 1999(Canada))
Sophie Marcotte
http://home.nordnet.fr/~yclaeyssen/racine.html
Bush et le Memex (DEA Info-Com, Juillet 94)
Hypertextes Et Hypermedia
Yan Claeyssen
http://www.boson2x.org/article.php?id_article=59
As we may think (The Atlantic Monthly, juillet 1945)
Vannevar Bush
http://webgate.zaphebergeur.net/vannevar.htm
@s we may think
Texte traduit Ch. Monnatte
http://www.liberation.com/page.php?Article=75015
Microsoft à l'assaut de nos archives ( Libération mardi 17
décembre 2002)
Edouard LAUNET
http://www.eecs.mit.edu/AY95-96/events/bush/photos.html
"As We May Think" A Celebration of Vannevar Bush's 1945 Vision, An Examination
of What Has Been Accomplished,and What Remains to Be Done
(Photographies de bush et des ses différentes inventions)